Ronald Cowie
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Le 6 janvier 1960, une foule d´anonymes et quelques amis se retrouvent devant la grande maison de Lourmarin où le corps d´Albert Camus a été transporté dans la nuit. Quatre villageois portent le cercueil que suivent son épouse, son frère Lucien, René Char, Jules Roy, Emmanuel Roblès, Louis Guilloux, Gaston Gallimard et quelques amis moins connu, parmi lesquels les jeunes footballeurs du village. Le cortège avance lentement dans cette journée un peut froide et atone de ce « pays solennel et austère – malgré sa beauté bouleversante ».
Devant le caveau, Francine Camus jette une rose sur le cercueil. Le maire prononce une courte allocution et le silence n´est troublé que par le bruit de la terre sur le bois de la bière.
L´heure est de recueillement. Les communiqués officiels, les télégrammes affluent. Tous unanimes dans l´hommage et l´affliction conjugués.
Les temps ont changé, et ils sont nombreux, les détracteurs d´hier qui saluent aujourd´hui la disparition de celui aux côtés duquel ils avaient obstinément refusé de marcher. Celui qui, au terme de tant d´attaques et de malveillance, avait choisi de s´enfermer dans un douloureux silence.
Les premiers tirs étaient venus de gauche, et plus particulièrement du parti communiste qui ne pardonnait pas à cet ex-compagnon de route de prendre du recul, de regarder en face certaines réalités. De dire l´intolérable : le stalinisme, les camps, les idéaux mis au pas par des tyrans de l´histoire.